L’herbe n’est pas plus verte ailleurs : le cancer du sein par-delà les frontières
Diagnostic Après le cancer du sein Pink Support28/10/2022 - Il y a deux ans, les médecins ont découvert chez Christine un carcinome canalaire in situ (CCIS), une forme de cancer du sein qui se développe dans les canaux galactophores. Le pronostic était heureusement favorable, le problème ayant été découvert bien à temps, mais cela restait tout de même un cancer du sein. Christine nous raconte son parcours et sa décision, après son diagnostic, de créer l’asbl Phara4U pour offrir des prothèses externes et des soins de suite adaptés aux patientes équatoriennes – une aide qu’elle espère pouvoir élargir bientôt à d’autres pays.
De bonnes nouvelles… et des mauvaises
« En juin 2020, j’ai pris rendez-vous chez mon radiologue attitré pour un contrôle, comme je le fais régulièrement depuis de nombreuses années en raison de mes antécédents familiaux et de plusieurs anomalies préexistantes chez moi-même. Malheureusement, pour le coup, il n’a pas pu tout à fait me rassurer, l’examen ayant révélé des microcalcifications qu’il faudrait tenir à l’œil ; je devais refaire un contrôle après un an. Lorsque je suis retournée le voir pour une nouvelle mammographie, l’année suivante, les microcalcifications étaient toujours là et il m’a donc recommandé de contacter mon gynécologue. Dès le lendemain, on m’a fixé d’autorité une série de rendez-vous pour examiner le problème de plus près. C’est lorsqu’on ma imposé des dates sans me demander mon avis que j’ai réalisé pour la première fois que je devais peut-être m’attendre à une mauvaise nouvelle.
Une semaine et une multitude d’examens plus tard (dont une biopsie), le diagnostic est tombé : je souffrais d’un CCIS, un carcinome canalaire in situ. C’est une tumeur de bon pronostic, puisque les cellules cancéreuses sont encore confinées aux canaux galactophores et qu’on ne s’attend donc pas à trouver des métastases, mais je devais tout de même être opérée pour la retirer. À l’IRM, il est apparu que mon sein gauche était pratiquement envahi par mon CCIS. Il n’y avait rien à voir, rien à sentir, mais les cellules cancéreuses étaient apparemment partout. L’amputation était inévitable. J’avais essayé de me préparer à ce que le chirurgien/gynécologue me dise que ce n’était qu’une fausse alerte ou au contraire à ce qu’il m’annonce une mauvaise nouvelle. En définitive, il y avait du bon et du moins bon, la mauvaise nouvelle étant que je souffrais d’un CCIS, la bonne que le pronostic était excellent, la maladie ayant été découverte à temps. Mais on a beau essayer d’anticiper ses propres réactions, on ne peut pas vraiment les prévoir ni s’y préparer. »
Une oreille attentive
« J’ai informé certains proches en personne de mon diagnostic, mais la plupart l’ont appris par e-mail. J’ai essayé d’annoncer la nouvelle de façon positive en insistant sur le diagnostic précoce, le pronostic favorable et l’absence de métastases, et mon entourage m’a donc renvoyé l’image d’une femme forte capable de surmonter l’épreuve… et ce n’est pas faux, mais si l’année écoulée m’a bien appris une chose, c’est que la force n’empêche pas de ployer voire de se rompre. Il était très important pour moi de pouvoir parler ouvertement de mon diagnostic. On peut avoir un cancer du sein sans forcément observer une petite boule ou un creux suspect et il me semble donc capital d’inciter le plus possible de personnes à se soumettre à un contrôle.
Ce qui m’a le plus touché, c’est la sollicitude de ma voisine Christine, qui a cuisiné pour nous au cours de la semaine qui a suivi mon amputation. Je venais à peine de sortir de l’hôpital qu’elle venait déjà nous apporter un repas. Elle a fait le tour de toute la maison pour mettre de l’ordre et m’a fait me coucher dans mon fauteuil dès qu’elle a remarqué que je ne me sentais pas bien. Je lui suis tellement reconnaissante pour ce soutien pratique durant les premiers jours !
Une trajectoire corsée
« La première étape de mon traitement a été l’amputation du sein gauche, suivie d’une reconstruction au moyen de mes propres tissus (lambeau DIEP). Quelques jours après l’intervention, le chirurgien esthétique est venu me voir pour m’expliquer qu’il avait encore trouvé des cellules cancéreuses en m’opérant, mais qu’il fallait partir du principe que c’étaient vraiment les dernières et que mon CCIS était complètement éliminé. Cette découverte ne changeait du reste rien au traitement : je vais encore devoir prendre du tamoxifène pendant quelques années et me soumettre à un suivi draconien. En principe, cela devrait suffire. »
Comme j’ai annoncé la nouvelle de façon positive en insistant sur le diagnostic précoce, le pronostic favorable et l’absence de métastases, mon entourage m’a renvoyé l’image d’une femme forte capable de surmonter l’épreuve… mais si l’année écoulée m’a bien appris une chose, c’est que la force n’empêche pas de ployer voire de se rompre. - Christine
Une idée folle
« J’ai vécu avec des prothèses externes pendant neuf mois. Dès que la date de ma reconstruction a été fixée, j’ai pu me focaliser sur cette échéance positive, mais j’ai aussi pris conscience que je n’aurais bientôt plus besoin de mes prothèses. J’ai donc commencé à me demander ce que je pourrais en faire. Plutôt que de rester à prendre la poussière, ne pourraient-elles pas resservir pour quelqu’un d’autre ? C’est ainsi qu’est née l’idée un peu folle de récolter des prothèses usagées pour les patientes équatoriennes.
Comme il était prévu que je me rende de toute façon en Équateur pour mon travail, j’ai parlé de l’idée à mes collègues sur place en leur demandant leur aide pour nouer des contacts avec des médecins, hôpitaux et autres pour dresser un tableau des besoins. Quelques semaines plus tard, j’ai reçu la nouvelle tout à fait inattendue que le Rotary Club de Tena était prêt à procéder à la distribution des prothèses lors de ma visite, en février, et voulait savoir combien j’en avais à disposition. À ce point dans le temps, à quelques semaines de mon départ, je n’en avais pas une seule ! Grâce au service communication de la haute école HOGENT, mon projet a heureusement pu être abondamment relayé dans la presse. J’ai aussi sollicité des organisations comme Pink Ribbon, car j’avais besoin d’un site internet auquel référer les personnes intéressées. Pink Ribbon m’a proposé de créer une page d’action sur sa plateforme Pink Support. »
Phara4U asbl
« Ce sont les articles dans la presse qui m’ont valu le plus de réactions. Très rapidement, les prothèses ont commencé à affluer et j’ai finalement pu en emmener plus d’une centaine avec moi en Équateur. Sur la base militaire COS-2 de Tena, au cœur de l’Amazonie, nous avons distribué en l’espace d’une demi-journée quelque 65 prothèses, parfois accompagnées d’un soutien-gorge adapté. Entre-temps, nous avons déjà pu en fournir à plusieurs centaines de patientes, mais plusieurs centaines d’autres attendent toujours.
Au total, nous avons organisé huit envois entre février et mi-septembre. Comme il est très compliqué de trouver un transporteur et encore plus de faire entrer des biens en Équateur par cargo, nous nous organisons pour apporter nous-mêmes chaque lot de prothèses sur place, ce qui nous permet de comprimer les coûts, d’accélérer les choses et d’être certains que tout arrive à bon port. Pour sept des huit envois, nous avons pu profiter de déplacements déjà prévus pour le boulot ou confier une valise pleine de prothèses à une connaissance, ce qui a fortement limité les frais. KLM accepte généralement de sponsoriser les bagages supplémentaires et, si nécessaire, les Rotary clubs équatoriens peuvent intervenir dans les coûts. J’ai assuré moi-même la livraison du mois de juillet entièrement à mes frais – et avec plaisir, mais je ne pourrai pas continuer à le faire indéfiniment. C’est pour cela que j’ai fondé Phara4U asbl, qui nous permettra notamment de récolter des fonds en lançant des projets ou de recevoir des dons.
Le soutien nécessaire en Équateur va aussi bien plus loin que la distribution des prothèses. Dans un premier temps, les activités de Phara4U asbl vont évidemment continuer à se focaliser avant tout sur cet aspect, mais nous voulons aussi explorer d’autres pistes, comme par exemple l’organisation de formations à la relaxothérapie ou aux massages thérapeutiques. Nous ne sommes pas non plus obligés de nous limiter à l’Équateur. Nous avons déjà parcouru un chemin énorme au cours des derniers mois. Grâce notamment à la page de notre action sur la plateforme Pink Support de Pink Ribbon, notre collecte n’a cessé de gagner en notoriété, au point que nous pouvons parler aujourd’hui d’un réel succès. »
Conclusion
« Toutes nos expériences contribuent à nous façonner en tant que personnes. C’est aussi ce qui s’est passé avec ce cancer : j’ai appris que je devais écouter mon corps, que m’accorder une pause n’était pas un signe de faiblesse et que je dois pas essayer d’en faire trop à la fois. Avancer lentement, c’est toujours avancer ! J’espère à présent que je retiendrai ces leçons. Je dois croire en ma guérison. Il y a toujours cette petite voix dans ma tête qui me dit qu’elle n’est pas tout à fait certaine, mais je suis bien suivie et je prends scrupuleusement ma dose quotidienne de tamoxifène. J’en ai encore pour quatre à neuf ans.
Dans le futur, je veux avant tout rester en bonne santé, essayer d’être heureuse et de profiter de la vie tout en étant attentive aux autres, mais aussi à moi-même. Phara4U asbl s’inscrit tout à fait dans cette optique. Si l’association devait se développer à un point tel que la combinaison avec mon travail devient difficile à gérer, je lèverais volontiers le pied sur le plan professionnel pour me concentrer davantage sur la collecte et la distribution des prothèses. »
Texte rédigé par Christine Van der heyden
Vous aussi, vous avez encore des prothèses mammaires que vous n’utilisez plus ? Contactez Christine à l’adresse borstprothesesvoorEcuador@gmail.com. Pour rester au courant des actions de Phara4U asbl, suivez la page Facebook de l’association ici. https://www.facebook.com/people/Phara4U-VZW/100083571434147/
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