Près de 11 000 femmes sont confrontées au diagnostic du cancer du sein chaque année en Belgique. La plupart de ces cancers sont hormonodépendants, mais une minorité (environ 15 %) ne l’est pas. Il s’agit de cancers du sein triple négatifs, qui se développent et métastasent souvent plus rapidement que les cancers du sein hormonodépendants. C’est la raison pour laquelle les cancers du sein triple négatifs sont dits plus agressifs. Le traitement consiste généralement en une chirurgie, une radiothérapie, une chimiothérapie et une immunothérapie. De tous ces traitements, la chimiothérapie est souvent le plus lourd, en raison des effets secondaires : perte de cheveux, nausées, vomissements, fatigue… D’où l’importance de ne traiter que les femmes chez qui la chimiothérapie aura réellement un effet bénéfique. Si la chimiothérapie est toujours envisagée face à un cancer du sein triple négatif détecté à un stade précoce, elle n’est pas toujours administrée. Pour un cancer de stade 1 diagnostiqué très tôt, sans atteinte des glandes axillaires et sans métastases dans d’autres parties du corps, elle n’est pas toujours nécessaire. La décision n’en reste pas moins très difficile à prendre, car la chimiothérapie peut empêcher une rechute à plus long terme. Les cancers du sein triple négatifs ne sont pas sensibles aux hormones. L’hormonothérapie n’est, par conséquent, d’aucune utilité. L’hormonothérapie de plusieurs années que les personnes atteintes d’un cancer du sein hormonodépendant se voient administrer après le traitement sert à prévenir les rechutes.

Nouvelle étude

Un groupe international de chercheurs, dont le médecin-chercheur Roberto Salgado d’Anvers, a découvert que les cellules immunitaires des patientes jouaient un rôle crucial dans le risque de rechute lors d’un cancer du sein triple négatif. Le groupe a recueilli les données médicales de 1 966 femmes âgées en moyenne de 56 ans, atteintes d’un cancer du sein triple négatif détecté à un stade précoce (stade 1, sans atteinte des ganglions lymphatiques) et qui n’avaient pas subi de chimiothérapie, mais uniquement une intervention chirurgicale et une radiothérapie. Les chercheurs disposaient, pour toutes ces femmes, de données précises sur le tissu mammaire prélevé. Ce tissu est toujours envoyé au laboratoire après l’opération, aux fins d’une analyse au microscope. Cet examen est essentiel, car il fournit des informations sur le type exact de cancer du sein. Cet examen au microscope a révélé la présence d’une quantité tantôt élevée, tantôt faible de cellules immunitaires dans le tissu cancéreux. Les chercheurs ont étudié ce que cela impliquait. Conclusion ? Les femmes dont le tissu cancéreux contenait de nombreuses cellules immunitaires présentaient un risque de rechute après 5 ans de suivi nettement inférieur à celui des femmes dont le tissu prélevé contenait peu de cellules immunitaires : plus de 90 % contre 72 %. Les chercheurs en concluent que pour les femmes atteintes d’un cancer du sein triple négatif de stade précoce, dont le tissu mammaire prélevé contient de nombreuses cellules immunitaires, on peut décider en bonne conscience que la chimiothérapie n’est pas nécessaire, car les chances de survie sont très élevées. Chez environ une femme atteinte d’un cancer du sein triple négatif sur quatre, le système immunitaire produit de nombreuses cellules immunitaires contre le cancer. Aucune chimiothérapie supplémentaire n’est donc nécessaire.

*Leon-Ferre RA, Jonas SF, Salgado R, et al. Tumor-Infiltrating Lymphocytes in Triple-Negative Breast Cancer. JAMA. 2024;331(13):1135–1144. doi:10.1001/jama.2024.3056