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Le mari de Veerle a eu un cancer du sein

Traitement Après le cancer du sein Témoignage

Le cancer du sein chez les hommes est une maladie rare. Il reste dans l’ombre. Joachim et moi mettons tout en œuvre pour la faire connaître. « Il peut être difficile d’expliquer au pharmacien que ce traitement hormonal est destiné à votre mari et pas à vous. »

C’était il y a un peu plus de huit ans… Veerle (70 ans) remarque une protubérance, une boule, sous le mamelon de son mari Joachim (72 ans). Il ne s’inquiète pas vraiment. « On aurait dit un ulcère, un petit abcès, quelque chose comme ça », se rappelle-t-elle.

Au début, Veerle ne panique pas, mais la boule ne disparaît pas. « Je lui faisais remarquer de temps en temps qu’elle grossissait. » Il faudra trois ans avant que Joachim se décide un beau matin à consulter son généraliste. La petite boule sous son mamelon a alors la taille d’une bille. Elle est rouge, semble enflammée et fait très mal. « Joachim ne pouvait même plus boutonner sa chemise », raconte Veerle. Le médecin voit tout de suite ce que Joachim refuse de voir depuis des années : l’éventualité d’un cancer du sein. Les examens complémentaires confirment l’hypothèse. Pour le couple, tout s’arrête l’espace d’un instant.

Veerle a elle-même survécu à un lymphome et sait ce que ça implique. Une de ses filles a également eu un cancer du sein. Toutes deux s’en sont bien sorties. « Après la frayeur, nous sommes vite passés en mode combat. Pour être honnête, j’ai d’abord paniqué, purement et simplement. J’ai eu peur de le perdre. »

« Les médecins pensaient que c’était moi la patiente »

Commencent alors les traitements pour Joachim. D’abord une chimiothérapie courte, mais intense. Après quelques mois, il subit une intervention. Veerle remarque une chose : « C’était moi la patiente. Les médecins pensaient systématiquement que c’est moi qui avais un cancer du sein. C’est assez étrange… et toujours très pénible pour Joachim. D’un autre côté, tout le monde nous connaissait à l’hôpital. Tous les médecins, tous les assistants voulaient voir au moins une fois l’homme atteint d’un cancer du sein. » L’intervention destinée à extraire la boule se passe sans problème. Joachim reçoit ensuite une radiothérapie. « Il y avait déjà des métastases, mais les médecins étaient presque certains de pouvoir les traiter. Joachim était extrêmement fatigué et il n’avait pas l’habitude. Il lui arrivait aussi de s’asseoir en pleurs à la table de la cuisine. Il avait peur et il s’en voulait peut-être d’avoir attendu si longtemps. »

Hormonothérapie

Après la radiothérapie, Joachim reçoit un traitement par Nolvadex, comme beaucoup de femmes. Il s’agit d’un anti-œstrogène administré pour éviter les récidives. « C’est étrange, car on pourrait croire que la procédure de traitement d’un cancer du sein est différente chez les hommes, mais ce n’est pas le cas », explique Veerle avec détermination. « Les effets sont d’ailleurs plus ou moins les mêmes. Joachim a arrêté les hormones il y a peu et ce n’est que maintenant, plusieurs mois après l’arrêt des médicaments et des années après le diagnostic, que j’ai le sentiment de retrouver un peu mon mari. »

« Après 50 ans, nous n’allons pas nous séparer pour une broutille, mais depuis quelques mois, il y a des moments où il m’exaspère. Joachim a toujours été du genre à faire des compliments. Si j’avais une nouvelle robe ou si je m’étais faite belle, il le remarquait. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il y a encore quelques semaines, il m’a complimentée sur un chemisier que j’ai depuis trois ans… »

Veerle me donne un autre exemple : « J’avais prévu un petit cadeau pour son anniversaire, avec les amis de l’académie. Quand je l’ai apporté, j’avais prévu largement assez pour que chacun ait le choix, il m’a rabrouée devant tout le monde. Il ne l’aurait jamais fait avant. Ce n’était ni juste ni nécessaire. Un de ses amis m’a accompagnée dehors pour me réconforter un peu. On lui pardonne, mais tout de même, m’humilier de la sorte… Il ne m’avait pas habituée à ça. Ce genre de chose n’arrive plus depuis qu’il a arrêté les hormones. » Le couple s’est-il beaucoup disputé à ce sujet ? « Oh non. Il y aurait de quoi se disputer tous les jours. Mais ces dernières années, c’est vrai que j’ai eu plus souvent envie de le gifler ou de m’en aller que les années précédentes. » Cette période a donc été rude.

Moins de désir

L’hormonothérapie s’est aussi accompagnée d’une baisse de libido. « Joachim l’a mal vécu », reconnaît Veerle. « Il a perdu une part de virilité. » Elle revient depuis que l’hormonothérapie est terminée. Veerle préfère en rire. « Je n’ai pas su tout de suite quoi faire, parce que physiquement, ça ne marche toujours pas. » Mais il s’agit d’un lent processus.

Joachim et Veerle sont assez mûrs et en couple depuis suffisamment longtemps pour relativiser ce genre de désagrément. Qui plus est, ce n’est pas comme si la sexualité disparaissait à l’âge de la retraite et il y a aussi des hommes plus jeunes qui souffrent d’un cancer du sein.

Nous sommes plus indulgents

Le cancer du sein de Joachim a eu des répercussions sur leur couple. « Même s’il est un peu redevenu lui-même, je remarque que mes réactions ont changé. Avant, il pouvait épiloguer sérieusement sur certains sujets. Et si je n’étais pas d’accord, je le disais. Je ne le fais plus. Ni lui ni moi n’avons encore l’énergie de nous quereller. Quand il lui arrive de me bombarder d’arguments, je me dis généralement : laisse tomber, ça ne sert à rien. » Non pas qu’elle l’éponge, car Veerle est une femme de caractère, mais c’est un choix qu’elle a fait, pour se protéger et pour protéger Joachim. Une forme d’indulgence. « Il en a besoin pour se sentir fort, mais il a eu très peur, ces dernières années. »

Hobby

Plusieurs éléments ont aussi été déterminants pour Veerle, comme en témoigne l’attention qu’elle y accorde. « Il était bon pour Joachim, et donc pour moi, qu’il continue à pratiquer son hobby. Il gardait ainsi un objectif et un groupe de gens à qui parler. Pour ma part, je fais un peu de bénévolat, ce qui m’a offert une sorte d’exutoire. Joachim a également rejoint l’association Borstkankerman. Cette ASBL vise à attirer l’attention sur le cancer du sein chez les hommes, afin que des hommes comme Joachim n’attendent pas trois ans avant de consulter un médecin. L’association accueille aussi les patients : c’est primordial au vu des nombreux tabous qui entourent la maladie. »

Le 7 octobre a été proclamé Journée internationale du cancer du sein chez l’homme.

BorstkankerMAN Les hommes peuvent aussi développer un cancer du sein

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