L’Homme Du Mois : Rudy Verheyen (61), Manager Boulangerie à l’hypermarché Carrefour de Schoten
Traitement Amitié Soins psychosociauxAu début de cette année, Carrefour a lancé un calendrier avec 12 employés qui posent nus. Les recettes du calendrier vont intégralement à notre asbl. Chaque mois, nous présentons L’Homme Du Mois sur notre site. Ce mois-ci, c’est Rudy Verheyen (61 ans), Manager Boulangerie à l’hypermarché Carrefour de Schoten : « Nous avons décidé de profiter du peu de temps qu'il nous reste. L’anée prochaine, nous prenons tous les deux notre retraite. Nous aurons moins de revenus, mais plus de temps pour profiter de la vie à deux. »
« Linda avait environ 40 ans, quand nous nous sommes disputes à propos du fait qu’elle n’avait plus consulté de gynécologue depuis des années. Linda jugeait cet examen inutile, puisqu’on lui avait enlevé l’utérus suite à des complications médicales par le passé. J’ai finalement exigé qu’elle prenne rendez-vous et ce contrôle n’a rien révélé d’inhabituel. Mais le médecin lui a tout de même conseillé de faire une mammographie. Et là, il s’est avéré que Linda avait le cancer. Il n’y avait pas de petites boules, le cancer avait plutôt la forme d’une feuille de papier imbriquée dans son sein. C’est pour ça qu’elle n’avait jamais rien senti. Résultat : Linda devait être opérée le plus vite possible. On a enlevé une grande partie de son sein.
Supporter la douleur
Linda a dû subir des rayons : trente séances. Aujourd’hui, les techniques sont plus avancées et plus précises, mais il y a 15 ans, c’était plus primaire. Après la première séance de rayons, tout semblait aller bien. Après le dixième traitement, Linda a commencé à se sentir un peu plus mal. Après la vingtième, elle avait des brûlures, qui sont passées au troisième degré après la trentième séance. Elle n’avait pas le droit de soigner ses plaies, ne pouvait pas appliquer de pommade, juste un peu de talc. Ma femme n’avait pas d’autre choix que de supporter la douleur.
Pour la suite du traitement, on l’a mise dans un bunker pour l’irradier via une dizaine d’aiguilles presque aussi épaisses qu’un petit doigt, qu’on enfonçait dans sa poitrine. Elles étaient introduites sous anesthésie, mais retirées sans. Quand ce fut terminé, et que Linda a été enfin un peu remise des brûlures, la chimiothérapie de près de huit mois a commencé. Avec toute la misère que l’on sait : se sentir malade comme un chien, perdre ses cheveux, espérer à chaque examen que les résultats sanguins seront bons et que les globules seront en assez bon état...
Une grave dépression
Linda a été incroyablement courageuse pendant toute cette période. Ensemble, nous avons trois enfants -un de son précédent mariage, deux avec moi – et devant eux, elle se montrait forte. Mais quand ils étaient au lit, Linda ne pouvait pas retenir ses larmes. Parce qu’elle n’avait plus de cheveux et qu’elle ne se sentait plus femme depuis qu’on lui avait enlevé un sein. Le verdict est tombé après la chimiothérapie : ‘Vous êtes officiellement guérie’. Mais nous n’en étions qu’au début. Après s’être montrée plus forte qu’elle ne se sentait réellement pendant un an et demi, Linda s’est effondrée. Elle a fait une grave dépression – une épreuve qui a duré bien plus longtemps que le traitement du cancer et qui a des conséquences encore aujourd’hui. En plus de l’aspect médical du cancer, il y a le côté psychologique. Comment se comporter avec des enfants quand on est frappé par une maladie comme le cancer ? Comment leur annoncer que les choses peuvent aussi mal se terminer ? Sans parler des contrôles angoissants qui se succèdent. A chaque fois, on tremble en attendant les résultats…
L’importance du soutien post-traitement
Les retombées psychologiques sont parfois pires que le traitement du cancer luimême. On négligeait et on néglige encore ce soin-là. Pour ma femme, mais aussi pour toute notre famille. Comment aborder, en tant que partenaire, cette nouvelle situation ? Comment gérer une famille parce que votre femme ne le peut plus à cause de la chimio ? Et en tant que femme, comment gérer la souffrance de ne plus se sentir à la hauteur quand on n’arrive même plus à nourrir ses enfants ? Autant de questions qui demandent de l’attention et un accompagnement professionnel. Nous avons dû nous débrouiller seuls. J’espère que cette action de Pink Ribbon apportera encore plus d’attention à l’importance du soutien posttraitement pour le patient et son entourage.
Pas d’assurance hospitalisation
Et puis il y a l’aspect financier. Quand ma femme est tombée malade, elle n’avait pas la chance d’avoir une assurance hospitalisation. Après son divorce, nous avions perdu de vue qu’elle n’était plus en règle de ce côté-là. C’est là que les factures d’au moins mille euros ont commence à pleuvoir. La première année, Linda recevait encore une allocation de la mutuelle. Après un an, le statut de Linda est passé à ‘invalidité’ et ses revenus ont diminué de plus de mille euros d’un coup. La totalité de notre salaire était englouti par les frais d’hôpital et nous n’arrivions plus à nouer les deux bouts. Nous avons été voir le Fonds fédéral pour le cancer, le Fonds flamand et même le CPAS. Personne n’a pu nous aider. On a limité nos dépenses au maximum, on n’a plus acheté de vêtements, on a entamé nos économies. Mais les frais courants étaient lourds et, très vite, nous nous sommes retrouvés dans le rouge. Au début, famille et amis nous ont prêté de l’argent, mais à la fin ils n’y arrivaient plus non plus. Finalement nous avons contracté un prêt de 12.000 euros pour payer les factures médicales. Une pilule très dure à avaler, qui a contribué à l’effondrement psychologique de ma femme.
Vivre aujourd’hui
Avant, nous étions très économes. Nous mettions des sous de côté, pour voyager quand nous serions plus vieux. Le traitement du cancer a tout changé. Linda voulait voyager maintenant, ne pas se refuser une belle robe, faire du shopping avec ses amies et manger une pâtisserie. Elle voulait vivre à fond, car ‘demain je ne serai peut-être plus là’. Cette attitude n’a fait qu’aggraver la situation, car nous ne pouvions pas nous le permettre. Aujourd’hui nous avons retrouvé une stabilité financière. Les enfants volent de leurs propres ailes, la maison est payée. Nous pouvons enfin voyager, découvrir le monde et faire ce que Linda désirait faire. Ma femme revient de loin. De temps en temps, elle a encore de gros coups de mou, mais nous avons appris à gérer cela. Après la guérison de Linda nous avons essayé de régler au plus vite une assurance hospitalisation. Mais aucun assureur ne veut nous la fournir, parce que Linda a eu un cancer. Peut-être aurions-nous une chance aujourd’hui, après toutes ces années, mais le tarif restera hors de prix, puisque Linda est une patiente à risque.
On est doublement pénalisé d’avoir été malade. Aujourd’hui nous vivons tranquillement. Nous nous sommes promis de profiter du temps qui nous reste. L’an prochain, nous serons pensionnés tous les deux. Nous aurons moins de revenus, mais plus de temps pour profiter de la vie à deux. Au final, il y a la maladie elle-même, et puis les facteurs psychologiques et financiers que rencontrent le patient et sa famille, et qui sont au moins aussi importants. Les gens prennent des nouvelles du malade, mais ne demandent jamais comment se portent le partenaire et les enfants, émotionnellement parlant, ou si on s’en sort financièrement. Et me voilà devant vous, parce que ma femme a enduré toutes ces épreuves, et qu’elle n’a jamais cessé de se battre. C’est bien la seule raison qui m’ait poussé à me mettre tout nu (rires) ! Mais aussi parce que d’autres, qui vivent la même chose, doivent être mieux aidés. J’espère sincèrement que Pink Ribbon et ce calendrier y contribueront. »
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